Loin des odes à la différenciation territoriale, toute la France a été mise sous cloche pendant le confinement, y compris les départements où le nombre de cas de coronavirus était très bas. La crise a démontré les interdépendances entre Etat et collectivités et les limites de la stricte répartition des compétences.
Jean Castex l’affirme depuis son arrivée à Matignon « Nous devons réarmer nos territoires, nous devons investir dans nos territoires, nous devons nous appuyer sur nos territoires ». Lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale, Jean Castex a employé le mot « territoire » à 25 reprises. Le lendemain, lors de sa prise de parole au Sénat, le Premier ministre l’a également utilisé 33 fois. Six mois plus tôt, la ministre de la Cohésion des Territoires et des Relations avec les Collectivités territoriales Jacqueline Gourault donnait le top-départ de sa réforme 3D, comme décentralisation, déconcentration et différenciation.
Fin juillet 2020, elle revient avec un projet de loi en faveur de l’expérimentation locale. Une procédure qui ne sera plus soumise à l’autorisation préalable du gouvernement et qui ne se soldera plus, comme auparavant, par son extinction ou sa généralisation : elle pourra être menée pour une durée indéterminée sur une seule portion du territoire. Parmi les pistes avancées, le transfert de nouvelles routes nationales à certains départements, le rapprochement de régions avec Pôle Emploi pour la formation des chômeurs, voire la recentralisation du RSA pour les départements qui le demanderont…
Car la crise a démontré les interdépendances entre acteurs. Daniel Béhar, géographe, professeur associé à l’Institut d’Urbanisme de Paris – Université Paris XII Val de Marne, enseignant à l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées et Directeur de la coopérative ACADIE explique que « Le modèle de décentralisation à la française a vécu : la loi « NOTRe » a constitué un ensemble très paradoxal, imposant tout à la fois des blocs de compétences alors que la philosophie de l’expérience bretonne promue à l’origine était, à l’inverse, la coopération, incarnée par les conférences territoriales de l’action publique. Aujourd’hui, il ne faut pas davantage de décentralisation mais une autre décentralisation : ne pas rester dans la verticalité, mais privilégier l’horizontalité de l’action collective. Echapper à la logique des lieux et privilégier une logique des liens. »
« Il est temps de sortir des blocs de compétences, pour aller vers des blocs de collectivités avec une négociation des fonctions qui permettent de créer des chaînes de valeur face à n’importe quelle situation, notamment de crise. »
Daniel Béhar
Alors qu’un groupe de gauche de l’Assemblée des départements de France (ADF) avait déjà demandé plus de décentralisation, c’est au tour de plus de soixante présidents de département de la droite et du centre de s’exprimer. Ils réclament un rééquilibrage des pouvoirs face aux régions et à l’Etat après la crise du coronavirus, estimant que le département est « le bon échelon » pour agir efficacement.
Ils constatent que d’un côté les maires « se sont trouvés désemparés par la crise, surtout dans les communes rurales » et que, de l’autre, « même pour distribuer les masques, Etat et régions ont sollicité les départements ». C’est pourquoi il faut « donner un nouvel élan à la décentralisation », selon eux. Il faut une « révision complète des schémas » ajoutent les présidents de départements. Ils plaident ainsi pour un Etat « qui assure les solidarités et le régalien », des régions « qui traitent les grandes stratégies économiques », et enfin le couple département-communes « qui constituera plus que jamais le socle de la République ».
Là où le département des Vosges par exemple met en avant ses maillons indispensables tels que garantir la solidarité économique, faire du sport, du tourisme et de l’agriculture, d’autres comme le département de l’Orne, espère que le confinement sera un révélateur pour faire revenir des habitants, et lance pour ce faire une campagne « Le choix d’une vie n’est pas secondaire ».
Quelles que soient les problématiques auxquelles sont confrontés les départements ou autres collectivités, chaque échelon doit s’appuyer sur son patrimoine bâti et foncier pour y trouver des solutions. En effet, ces nouvelles dynamiques (arrivée de population, nouveaux modes de travail et de consommation, compétences revues et adaptées à chaque territoire), auront des incidences sur les équipements des collectivités afin d’assurer la meilleure adéquation possible de l’existant avec les usages d’aujourd’hui et de demain. La vocation des Directions de Patrimoine est justement d’entretenir et valoriser l’ensemble du patrimoine foncier et immobilier de chacune des collectivités au bénéfice des politiques associées et conformément au cadre réglementaire qui s’y réfère.
Forte de ses missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage auprès des départements de l’Essonne, de la Vendée, du Val d’Oise notamment, et de nombreuses autres collectivités, l’équipe tbmaestro reste plus que jamais mobilisée afin d’accompagner les directeurs de patrimoine et les élus territoriaux dans l’élaboration et le suivi de la mise en œuvre de leur nouvelle politique patrimoniale.
Mots clefs : Décentralisation, répartition des compétences, différenciation, interdépendances, liens, socle de la république
Date de l’article : 26/08/2020
Rédacteurs : Claire Duclos
Sources :
- Tribune des présidents de département de la droite et du centre 20/06/20 :https://www.lejdd.fr/Politique/tribune-francois-sauvadet-monsieur-le-premier-ministre-faites-confiance-aux-departements-3976201
- Entretien Daniel Béhar, courrier des maires, 15/07/20 : http://www.courrierdesmaires.fr/88147/la-crise-marque-le-chant-du-cygne-de-la-decentralisation-a-la-francaise/